- Congrès de la PEEP à Clermont-Ferrand


Xavier Darcos a clôturé le 3 mai 2008 à Clermont-Ferrand le 89e congrès de la fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP). Dans son intervention, le ministre de l'Éducation nationale a déclaré que « les réformes en cours ont permis de poser les bases d'une école plus ouverte et plus accueillante pour les familles ».

Seul le prononcé fait foi

 

Madame la Présidente,
Mesdames et messieurs, mes chers amis,

En m'adressant à vous aujourd'hui, à l'occasion de la clôture de votre 89e congrès, je mesure le chemin parcouru depuis un an. Vous vous souvenez sans doute, en effet, que mon premier discours de ministre de l'Éducation nationale vous était consacré et que je vous avais dit à cette occasion ma volonté d'associer les parents à mon action, non pas comme de simples interlocuteurs de l'institution scolaire, mais comme des membres à part entière de la communauté éducative.
Je suis venu vous dire que ma détermination à rétablir le consensus entre l'école et les familles reste intacte.
Je suis venu vous dire que vous avez toute votre place dans les réformes que je conduis, qui vont bâtir une école plus moderne, plus juste et plus efficace.
Je suis venu vous dire que j'ai besoin de vous pour faire obstacle au conservatisme, pour lutter contre le dogmatisme et pour en finir avec le pédagogisme.

Oui, j'ai besoin de vous car nous avons trop longtemps laissé le monopole de l'école aux professionnels de la revendication matérielle, aux spécialistes autoproclamés de la question scolaire et à tous ceux qui pensent qu'il suffit de se réclamer du progrès social pour faire oublier leur conservatisme. J'ai besoin de votre liberté de ton, j'ai besoin de votre envie d'action, j'ai besoin de votre détermination pour faire avancer l'école.

Car l'école avance, et elle avance au rythme des libertés nouvelles qui sont offertes aux familles depuis un an.

La première de ces libertés, c'est la liberté de choisir l'établissement de son enfant. Dès mon entrée en fonction, vous vous en souvenez, j'ai mis en œuvre l'un des engagements majeurs du Président de la République : l'assouplissement de la carte scolaire.
 
Le système obsolète et rigide hérité des années 1960 n'était évidemment plus adapté à la France d'aujourd'hui et il était devenu un facteur d'aggravation des inégalités sociales qu'il prétendait combattre. L'assouplissement décidé en juin 2007 a permis de mettre fin à l'opacité du système des dérogations, en fixant une liste de critères de priorité objectifs et transparents. Cette première étape a permis de satisfaire un nombre important de demandes supplémentaires et, notamment, les demandes des élèves boursiers. En 2008, la règle devient celle du libre choix de l'établissement par les parents, la carte scolaire n'étant utilisée qu'en dernier recours lorsque la capacité des établissements ne permet pas de répondre à la demande des parents. Comme l'année dernière, j'ai demandé aux recteurs et aux inspecteurs d'académie d'accorder une priorité aux élèves boursiers et boursiers au mérite, aux élèves handicapés, mais aussi aux fratries désireuses d'être inscrites dans un même établissement scolaire.
 
J'ai également engagé les services déconcentrés de l'Éducation nationale à vous fournir une information complète et précise sur les démarches à entreprendre et sur les caractéristiques des différents établissements. En effet, pour rompre véritablement avec le passé, je tiens à ce que la suppression de la carte scolaire et les possibilités nouvelles qui en découlent puissent bel et bien bénéficier à toutes les familles et pas uniquement à celles qui ont les connaissances ou les moyens suffisants pour la contourner.

Cette liberté nouvelle, c'est aussi la liberté de mieux articuler le temps de l'école et le temps des familles, car ces deux temps sont également importants pour l'épanouissement des enfants. Les structures familiales ont changé, les rythmes de vie et les pratiques sociales aussi : l'école doit en tenir compte et c'est pourquoi j'ai voulu réorganiser l'articulation entre le temps de l'école et le temps des familles.

Réorganiser l'articulation entre le temps de l'école et celui des familles, c'est d'abord mettre en œuvre l'engagement du Président de la République à prendre en charge les élèves entre la fin des cours et le retour à la maison. C'est le sens du service d'accompagnement éducatif qui permet aux collégiens dont les parents travaillent et qui ne bénéficient donc pas, entre 16 heures et 18 heures, d'une présence adulte chez eux, de faire leur devoirs sous la conduite d'enseignants ou d'adultes spécialement formés ou encore de pratiquer des activités sportives, artistiques et culturelles. Mis en place dans les collèges de l'éducation prioritaire à la rentrée des vacances de la Toussaint 2007, ce dispositif a remporté un vrai succès et va être étendu, vous le savez, à tous les collèges, aux écoles de l'éducation prioritaire et à toutes les écoles volontaires dès la rentrée 2008.
 
C'est aussi pour faciliter la vie des familles et leur permettre de se retrouver que j'ai décidé qu'en cette même rentrée 2008, il n'y aurait plus cours dans les écoles le samedi matin, car je refuse que notre pays soit à la fois celui qui oblige ses enfants au plus grand nombre d'heures passées à l'école et celui qui fait empiéter le temps de l'école sur les deux jours réservés normalement aux familles.

Autre liberté offerte aux familles, la liberté de travailler même en cas de grève des personnels de l'Éducation nationale. C'est pour cela que j'ai proposé aux communes de signer avec l'Éducation nationale une convention pour permettre l'accueil des enfants dans les écoles primaires les jours de grève. Ce dispositif a rencontré un vrai succès partout où nous l'avons mis en place à l'occasion du mouvement social du 24 mai dernier et je ne peux donc que regretter l'attitude des municipalités qui ont refusé, par pure idéologie, de rendre ce service aux familles.
 
Je refuse, pour ma part, la double peine qui voulait qu'à l'absence d'enseignement pour les enfants, s'ajoute l'obligation de trouver des solutions de garde alternatives voire de prendre un jour de congé forcé et c'est pourquoi j'ai demandé aux inspecteurs d'académie de bien vouloir relancer ce dispositif dans la perspective du mouvement social du 15 mai prochain.

Parmi ces nouvelles libertés offertes aux familles, l'une des plus essentielles à mes yeux est la liberté de savoir ce que les élèves apprennent à l'école. Quoi de plus naturel, pour un parent, que de vouloir suivre quotidiennement le travail de son enfant, d'observer ses progrès et de le soutenir lorsqu'apparaissent des difficultés ? Mais avait-on jusqu'alors donné aux familles les moyens d'assurer leur mission de parents d'élèves ? Et s'il est commode d'accuser les parents de démission, force est de reconnaître qu'ils n'étaient pas plus associés à la réussite de leur enfant qu'à son échec.
En effet, les programmes scolaires étaient le plus souvent méconnus, voire ignorés des familles en raison de leur longueur, de leur complexité et de leur technicité.
 
J'ai voulu rompre avec cette mauvaise habitude pour en faire des repères accessibles à tous. Les programmes de l'école primaire qui entreront en vigueur à la rentrée prochaine sont donc clairs, concis et écrits dans une langue accessible à tous. Recentrés sur les apprentissages fondamentaux, ils affichent surtout avec précision les objectifs à atteindre à la fin de chaque année scolaire de sorte qu'il devient désormais possible pour toutes les familles d'accompagner la scolarité de leurs enfants.
Dire cela, je le précise, n'est pas faire acte d'idéologie, mais de pragmatisme. Alors je sais que cette évolution suscite des critiques indignées de tous ceux qui voudraient laisser l'école aux experts et considèrent que les familles n'ont pas vocation à l'être, mais je considère que l'avenir de nos enfants est trop important pour l'abandonner aux idéologues et aux pédagogistes. Ce qui me préoccupe n'est pas ce que les professionnels de l'éducation diront de ces programmes au cours des dix prochains jours, c'est ce que ces programmes permettront à nos enfants de devenir dans dix ans.
 
Et à ceux qui, au Parti socialiste et même chez d'anciens ministres de l'Éducation, continuent de s'élever contre l'idée qu'on puisse vouloir associer les familles à la mise en œuvre des programmes, un progrès qu'ils jugent populiste, je dis : « vous avez mis dix ans pour accepter l'idée que les 35 heures étaient une erreur économique, ne mettez pas dix ans à nouveau à reconnaître que vos méthodes ont échoué ».

Cette liberté nouvelle offerte aux familles, enfin, c'est la liberté d'apporter à chaque élève les moyens de surmonter ses difficultés. Je ne me résous pas à ce que de nombreuses familles soient obligées de se tourner vers des officines payantes pour assurer la réussite de leurs enfants et à ce que celles qui n'en ont pas les moyens soient condamnées à laisser s'installer la spirale de l'échec.

La scolarité gratuite et obligatoire est l'un des fondements de notre école républicaine. Aujourd'hui, il nous appartient d'ouvrir l'ère de la réussite gratuite et obligatoire. C'est donc dans un souci d'équité, qu'une aide aux devoirs est désormais proposée aux collégiens dans le cadre de l'accompagnement éducatif.
 
De même, la réorganisation du temps scolaire à l'école primaire a permis de réinvestir les deux heures libérées du samedi matin au profit des élèves en difficulté qui vont bénéficier d'un soutien en petits groupes. Enfin, les écoliers de CM1 et de CM2 qui, malgré tout, ne parviendraient à surmonter leurs difficultés peuvent bénéficier de stages gratuits pendant les vacances de Pâques ainsi qu'à l'été. Les premiers de ces stages viennent d'avoir lieu partout en France - partout du moins où les communes n'ont pas refusé, par idéologie, d'ouvrir leurs écoles aux enseignants volontaires et aux élèves désireux de progresser comme ce fut malheureusement le cas y compris dans de grandes villes comme Toulouse et Poitiers - et je peux vous dire que les enseignants, les familles et les élèves eux-mêmes sont très satisfaits de cette expérience inédite !

Vous le voyez, mesdames et messieurs, les réformes en cours ont permis de poser les bases d'une école plus ouverte et plus accueillante pour les familles. Désormais, elles ne sont plus les témoins lointains et silencieux de la scolarité de leurs enfants mais en deviennent au contraire les acteurs attentifs.
Je me réjouis d'ailleurs que dans le cadre du protocole d'accord signé avec les principales organisations syndicales du premier degré sur l'utilisation des deux heures libérées du samedi matin, le temps consacré à l'échange avec les familles ait pu être étendu.

Vous l'avez compris, la rentrée 2008 sera marquée au sceau de notre ambition commune pour l'école. Elle verra non seulement l'amplification de la dynamique engagée depuis un an et l'approfondissement des réformes. Elle sera également marquée par l'ouverture de chantiers nouveaux tout aussi décisifs pour la réussite de nos élèves.

En effet, notre objectif central, je l'ai dit, c'est de faire reculer l'échec scolaire pour assurer la réussite de tous les élèves, quels que soient leur âge, leurs talents et leurs ambitions. Atteindre cet objectif, c'est la nouvelle frontière de l'école et cela suppose d'affronter ensemble les vraies difficultés qui pèsent aujourd'hui sur la réussite de nos élèves.

Faire reculer cette nouvelle frontière passe tout d'abord par une réforme courageuse du lycée. En effet, tout le monde s'accorde pour dire que le lycée français fonctionne mal, qu'il est déséquilibré et qu'il ne fait plus réussir. L'ampleur de l'échec dans les premières années d'université suffit d'ailleurs à prouver qu'il existe un véritable problème et que nombre d'entre nos lycéens sont mal préparés à la poursuite de leurs études. Il est donc plus que jamais nécessaire d'imaginer le lycée de l'avenir et c'est un chantier que je veux ouvrir, au cours des prochains mois, avec les lycéens et leurs familles.

Cette réforme du lycée a déjà débuté avec la revalorisation de la voie professionnelle qui est injustement déconsidérée et laisse beaucoup trop d'élèves au bord du chemin, alors même que les perspectives professionnelles n'ont jamais été aussi encourageantes.
Je suis donc déterminé à offrir une qualification à tous ceux qui ont choisi l'enseignement professionnel et je veux qu'ils puissent décrocher leur baccalauréat dans les mêmes conditions que tous les autres lycéens, c'est-à-dire en trois ans après la classe de troisième.

Si la réforme de la voie professionnelle est largement engagée, il faut aujourd'hui élargir la réflexion et aller de l'avant. Il faut donc se confronter à ces enjeux majeurs que sont le redoublement, mais aussi l'entrée et la sortie du lycée.

Vous le voyez, mesdames et messieurs, le champ des possibles est largement ouvert. La seule certitude que j'ai, c'est que cette réforme du lycée nous devons la faire ensemble, avec les enseignants, avec les élèves et avec les familles, car c'est la meilleure façon de la réussir et ainsi de rendre service à nos enfants.

Faire reculer cette nouvelle frontière suppose aussi de saisir à bras le corps le chantier de l'orientation. Là encore, je tiens à ce que nous puissions travailler la main dans la main, car il est décisif de redonner la maîtrise de l'orientation aux familles. Je suis donc ravi que vous ayez choisi de consacrer votre 89e congrès national à cette question majeure pour l'avenir de nos enfants.
 
J'y suis d'autant plus sensible qu'en élargissant votre réflexion à l'horizon international vous rejoignez le thème central de la Présidence française en matière d'éducation. Sur cette question, comme sur les autres, je suis convaincu que la réflexion des familles peut apporter beaucoup.

Aujourd'hui, avant même d'esquisser des solutions, nous pouvons d'emblée établir un constat d'urgence. En effet, qui peut se satisfaire de l'opacité, de l'inefficacité voire du dogmatisme qui caractérisent aujourd'hui notre dispositif d'orientation ?

Je veux aujourd'hui reconquérir avec vous ce continent délaissé pendant des décennies par manque de courage et de volonté politique. L'introduction de parcours des métiers et la généralisation à tous les collèges de l'option de découverte professionnelle en classe de troisième permettent désormais aux jeunes adolescents de se familiariser avec le monde professionnel et d'affirmer leurs aspirations, mais ce n'est pas suffisant.

Au système actuel qui méconnait les aptitudes de nos enfants et leur voile bien souvent la réalité du monde professionnel, je veux opposer une orientation dynamique et ouverte qui prendra en considération les goûts des élèves et les aspirations de leurs familles.

Mais je veux surtout que l'orientation de demain soit largement ouverte sur l'environnement économique afin que les familles puissent connaître avec précision les débouchés des différentes filières et les chances de réussite qu'elles offrent à leurs enfants.

Vous le voyez, les réformes engagées depuis un an et celles à venir poursuivent un objectif central : assurer la réussite des élèves et je veux que leurs familles soient associées à cette réussite.
 
Si l'école de demain doit être plus ouverte, si elle doit offrir plus de services aux élèves et à leurs familles, il ne faut pas avoir peur de dire que l'école que nous voulons sera aussi une école du respect et de l'autorité puisque nous sommes tous convaincus de la nécessité de transmettre à nos enfants les valeurs et les repères qui les aideront demain à faire le meilleur usage de leur liberté d'adulte.

Le respect, c'est d'abord le respect de l'école pour les familles qui doivent être associées le plus étroitement possible à la scolarité et à la réussite de leur enfant.

Mais le respect, c'est aussi le respect de l'élève envers ses camarades et ses professeurs, chargés de lui transmettre les savoirs qui lui seront nécessaires tout au long de sa vie personnelle et professionnelle. Il est donc intolérable que des élèves ou des enseignants puissent être agressés verbalement, voire physiquement, par des élèves encore jeunes. Pour y répondre, je m'engage à ce que chaque acte de ce type soit sanctionné avec la plus grande fermeté.
 
En outre, j'ai souhaité que nous nous dotions d'un code de la paix scolaire qui permettra de préciser très clairement quelles sont les sanctions qui doivent s'appliquer systématiquement chaque fois qu'un élève enfreint les règles de la vie à l'école.

Le respect, c'est enfin le respect des familles envers l'école car leur attitude est déterminante dans la réussite scolaire de leurs enfants.

Je crois en particulier que l'affection légitime portée à un enfant ne saurait nous conduire à cautionner son comportement en toute circonstance et encore moins à nous désintéresser de sa scolarité. Au contraire, la famille doit apprendre à son enfant à respecter le maître, l'école et le savoir, quitte à faire preuve et je le dis en toute franchise car le mot ne me gêne pas, d'autorité. Et sur ce point, permettez-moi de vous dire très franchement que j'ai été choqué d'apprendre que certains parents entretenaient les peurs et les fantasmes jusqu'à inciter leurs enfants à descendre manifester dans les rues contre les décisions votées par la représentation nationale.

Mesdames et messieurs, mes chers amis,

L'école que je veux pour nos enfants, c'est une école où l'autorité et le respect ne seront plus bafoués. C'est une école qui offre des services nouveaux aux élèves et leur donne les moyens d'atteindre les objectifs. C'est enfin une école qui aide et accompagne tous ceux qui rencontrent des difficultés.

Cette école du respect, de la tolérance et de la réussite ne saurait être construite contre les parents d'élèves. Au contraire, je suis intimement convaincu qu'elle doit être imaginée avec les familles, parce qu'elles confient à l'école ce qu'elles ont de plus cher au monde et parce qu'il est illusoire d'envisager la réussite d'un enfant sans l'attention et le soutien de sa famille.

Cet effort commun pour donner du sens à l'école est décisif pour la Nation entière car il n'est pas de projet politique sans conviction éducative.
 
En restaurant le consensus entre les familles et le système éducatif, en plaçant la réussite de nos enfants au cœur de notre ambition pour l'école, nous lui permettrons de redevenir en Europe le modèle ouvert et généreux qu'elle n'aurait jamais dû cesser d'incarner.

Je vous remercie.

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